mardi 25 décembre 2018

Noël à Port-Aux-français


Pour beaucoup d’hivernants, Noël dans les terres australes est un moment particulier, loin de ses proches, mais aussi bien entouré par d’autres personnes, collègues et camarades, qui comme eux, ont fait le choix d’une expérience humaine hors norme.


Nos pensées vont évidement vers ceux qui nous sont chers, restés en métropole, à la Réunion et ailleurs, mais aussi vers ceux que l’on côtoie depuis maintenant plusieurs semaines, voire plusieurs mois.


C’est aussi un moment de partage et de fraternité.


Petite allocution du chef de district, pour communiquer le message de Mme la Préfète des TAAF et souhaiter à chacun un joyeux noël, avant de trinquer tous ensemble.

Avant d'attaquer les choses sérieuses,




Moment ensuite de gourmandise et de convivialité, grâce au pâteux, au chef cuisinier et son équipe, qui régaleront nos papilles.








Chacun aura son petit cadeau, geste attentionné entre hivernants, qu’il soit fait main à la dernière minute, ou encore prévu de longue date avant le départ, cela fait toujours plaisir.   




                                                       Joyeux Noël à tous!



jeudi 20 décembre 2018

OP4




16 décembre 2018 – Le Marion Dufresne arrive à Port-Aux-Français pour sa quatrième et dernière opération portuaire de l‘année.



La base s’active tous azimuts pour réaliser son dernier ravitaillement de l’année. 






Que ce soit à la cale pour les rotations du Chaland chargé de convoyer les lourds containers,













              Sous l’œil attentif de José, le chef infra



Au port pétrolier pour assurer le ravitaillement en gasoil avec la manche, 






Ou bien par les airs pour la logistique des cabanes, l’entretien des relais radio ou des phares et balises.







Le travail n’empêche pas la bonne humeur!

Puis vient le moment des adieux


Le 19 décembre, une trentaine de partants quittent Kerguelen, dont certains arrivés un an plus tôt. Fin d’hivernage donc pour quelques-uns, et déjà fin de leur mois de campagne d’été pour d’autres.  



mercredi 7 novembre 2018

Suivi démographique des albatros à sourcils noirs


Manip à sourcils noirs - 2 au 5 novembre 2018
   
L'accès à la colonie et au site de sourcils noir se mérite; après 2h45 à bord du chaland, l'Aventure II, nous sommes déposés sur le halage des naufragés qui sépare les presqu’îles Ronar'ch et Jeanne d'Arc. 
Il faut ensuite effectuer une bonne marche pour atteindre la cabane de sourcils Noirs qui sera notre camp de base pour toute la durée de la manip.
      






 En approche du canyon…


    








Après 4 heure d’efforts, nous découvrons, blottie au creux de son ravin, la cabane de Sourcils Noirs.  

Notre petite cabane est un vrai nid douillet, en bordure d’une jolie petite rivière. On peut y dormir jusqu’à 7 personnes.On y trouve son traditionnel entassement de touques, ces bidons bleus étanches dans lesquels les vivres sont stockés au sec et à l’abri des rongeurs. Le ravitaillement des cabanes se fait lors des opérations portuaires par hélicoptère, comme pour les refuges dans nos montagnes des Alpes ou des Pyrénées.




On remonte ensuite sur le plateau pour se rendre au bord de la falaise, où nous attend la « caisse bois ». Ce type de module, lui aussi déposé par hélico, sert de lieu d’entrepôt de matériel.
  











Nous nous y équipons du matériel de sécurité, casque,  baudrier de travail avec torse, système anti-chute et double longe et nous voila partis pour équiper la main-courante.











Deux longueurs de main-courante plus bas, nous arrivons sur une grande terrasse d’où l’on accède à la colonie nichée à flanc de falaise


 
  
Un albatros peut faire jusqu’à plus de trois mètres d’envergure ; le plus grand est l’albatros hurleur, mais celui qui nous intéresse aujourd’hui est un peu plus petit, mais ça fait quand même un volatile de trois à cinq kilos, pour 2 à 2,40 m d'envergure. Il peut vivre jusqu'à une soixantaine d'années. Et côté aérien, c’est un vrai voilier qui ne bat quasiment jamais des ailes, surfant dans les airs et utilisant le moindre vent.




Notre grand oiseau pélagique n’est pas le seul à fréquenter les lieux, et on trouve aussi en grand nombre le gorfou macaroni aux aigrettes magnifiques qui lui ne vole pas, et remonte depuis le rivage sur la falaise, empruntant des vires où il s’accroche au rocher grâce à ses petites pattes palmées et griffues.








Notre « maca » est un peu tapageur et territorial, avantageusement doté par dame nature d’un bec bien puissant avec lequel il maintient vigoureusement ses congénères à bonne distance de son nid. Car il ne faut pas l’oublier, si tout ce monde-là se donne la peine de grimper ici, c’est pour nicher et assurer sa descendance. Son jeu favori consiste à voler les cailloux du nid du voisin ! 
Gare donc à celui qui s’approche trop près, car il en pince pour vos mollets !
Et une fois dans l’eau, oubliée sa démarche hésitante et maladroite : il se transforme en nageur de combat, véritable torpille évoluant à une vitesse sidérante pour pêcher ses proies!  
Albatros fuligineux


Parmi les autres occupants des falaises environnantes, on trouve aussi l’albatros fuligineux dont le corps est digne du plus beau fuselage d’Airbus, ainsi que l’albatros à tête grise.








Une fois quitté la main courante qui nous a amené sur notre vire, plus question d’évoluer sur une corde au beau milieu des nids ; c’est donc avec précaution qu’il faut se faufiler entre les oiseaux et les nids, sur un terrain parfois délicat...  






Quatre aires ont été définies par les responsables de programmes scientifiques et font l’objet depuis de nombreuses années d’un suivi en termes d’évolution de la population, mais aussi sur d’autres domaines (alimentation, comportement,… ).

Sur chacune de ces aires topographiées, les nids sont numérotés et contrôlés lors des manips. On plante des fiches avec numéro pour les identifier. Les albatros réutilisent en effet les mêmes tous les ans, qui prennent de la hauteur progressivement.







On note l'occupation pour chaque nid. Un suivi des couples est réalisé par la même occasion.
On consigne enfin la présence d’un œuf, et le numéro de bague de l’oiseau.
Puis lors d’une autre manip un bon mois plus tard, on mesurera le succès de reproduction (présence de poussin). 






Il n’est pas toujours évident de s’y retrouver et cela nécessite une bonne coordination entre les manipeurs qui relèvent les éléments observés sur les nids et les oiseaux, et celui qui retranscrit tout cela sur son calepin et sur un plan.

Tout en faisant attention aux nombreux oiseaux en vol ou en phase d’atterrissage. Ici un tête grise, les "aéro-freins" sortis.




Comment ne pas succomber à ce regard charmeur…
Vous comprenez maintenant pourquoi sourcils noirs ? c’est ce délicat masque noir autour de l’œil qui évoque un sourcil.

A l’issue de bonnes journées de travail, les quatre aires seront ainsi répertoriées, soit  près de 300 nids.






Crédits photo : L. Jaunatre - A. Patoir 





     























































lundi 8 octobre 2018

Aurore australe

Le dimanche 8 octobre 2018 - 21h30

L'alerte est diffusée sur quelques téléphones de Port aux Français : le ciel commence à s'éclairer vers le sud...

Le slipway de Port aux Français semble nous ouvrir l'accès à un monde irréel

Débute alors une heure et demie de spectacle...


Notre Dame du vent n'en ratera pas une miette!























Bombardement solaire et
lumière sacrée



Dentelles d'antennes sur toile de fond  d'ions et de protons





Vers 22h30, l'intensité de l'aurore augmente brusquement et un maelstrom lumineux se déchaîne dans le ciel, semblant vouloir avaler la voûte étoilée toute entière. C'est le grand final, sous les yeux émerveillés de quelques spectateurs ébahis.

Une immense ondulation s'étire ensuite sur 'l'horizon, se cabre comme un animal vivant, puis se contracte en drapés majestueux,
avant de fondre dans la mer....
Chacun d'entre nous savoure cette magie céleste, comme une réponse à ce qui nous a poussé à venir sous ces latitudes. 


Un grand merci à nos deux photographes de génie, Armand et Jean-Baptiste, de nous faire partager ces instants de bonheur!



dimanche 7 octobre 2018

Manip Popéleph - Pointe Morne


* Manip « popéleph » : comme population des éléphants de mer

Depuis le début des années 2000, un programme scientifique a été mis en place pour suivre le comportement des éléphants de mer de kerguelen. 


Arrivés à OP2, trois scientifiques, Hassen (2ème année de thèse – université du Québec à Montréal), un habitué de Kerguelen puisqu’il en est à son deuxième séjour, Julie (1er année de thèse au centre d’étude biologique de Chizé / université de la Sorbonne) et Coline (vétérinaire en Savoie/IPEV), ont en charge la mise en œuvre sur le terrain d’un certain nombre d’observations et de mesures.
Les éléphants de mer austraux sont les plus grands représentants de la famille des phocidés et sont présents dans la région du circum-Antarctique. On estime la population globale à 600-800 mille individus.   
L'archipel de Kerguelen en abrite la première ou la deuxième population au monde, selon les sources, car seulement une petite partie des côtes de l'archipel a été recensé.
Quand arrive la saison de la mise bas par les femelles (début septembre à fin octobre), suivie de la période de reproduction, les plages de l’archipel se peuplent de harems au milieu desquels trônent les pachas (mâles dominants qui assureront près de 70 % des fécondations). 





Très rapidement après leur arrivée, les femelles donnent naissance à un seul petit  qui sera alimenté par le lait maternel, d’une très grande richesse nutritionnelle. 




A leur naissance, ils pèsent entre 40 et 45 kg, mais atteindront rapidement, en l’espace de seulement 23 jours, leur poids de sevrage, aux alentours de 120 kg.  





Les femelles pèsent entre 400 et 600 kg, et peuvent atteindre une vingtaine d'année.
Elles atteignent leur maturité sexuelle à partir de l’âge de 3 à 5 ans.






Les mâles, quant à eux, vivent moins longtemps, entre 14 et 15 ans, mais peuvent atteindre l’honorable poids de 2 à 3 tonnes. Ils se distinguent aussi par leur appendice nasal, leur trompe, d’où leur nom.






Notre équipe de scientifiques a donc pour tâche d’étudier le suivi démographique de la population de nos éléphants de mer.


Ces études consistent en un suivi des jeunes avec un bagage sitôt après leur naissance et jusqu’à leur période de sevrage, avec prise de taille et mesure d’isotope stable (un petit échantillon de peau permet de révéler leur régime alimentaire). Leurs mères font aussi l’objet d’études, et l’on cherche à connaître leur performance alimentaire par la pose de balise sur un nombre restreint d’individus. 







Ces balises, qui sont collées sur le pelage de l’animal, vont permettre d’acquérir un nombre conséquent d’informations, certaines d’entre elles pouvant servir également à d’autres programmes scientifiques (étude des variations des conditions océanographiques).







Pour cette opération, on utilise une capuche qui sera placée sur la tête de la maman pour l’immobiliser et la calmer, puis elle sera anesthésiée afin de faciliter l’ensemble des mesures (poids, biopsie et mensurations, puis mise en place des balises). 


Grâce à un système de géolocalisation, ces individus seront suivis pendant leur séjour en mer, et à  leur retour sur terre, les balises seront récupérées et leurs données exploitées. 
On arrive ainsi à définir leur parcours, leur comportement de plongée pour se nourrir- un éléphant de mer peut tenir une apnée de 20 minutes à 1h20, et sonder en moyenne jusqu’à 400 à 1000 mètres de profondeur, avec un record pour certains mâles à près de 2000 mètres! – et ainsi mesurer l’impact sur la reproduction.  
Les éléphants de mer se nourrissent essentiellement de poissons-lanternes, de crustacés et de calamars.                




Les balises, bardées de capteurs et de puces GPS ou Argos, d’accéléromètre et de magnétomètre, enregistrent également des données environnementales, notamment sur la salinité, la température de l’eau, ou encore la concentration en phytoplancton, mais peuvent aussi récolter des informations sur d’autres mammifères marins (enregistrements acoustiques).      

Les mamans éléphants de mer sont ainsi de précieuses auxiliaires de la science!






Notre joyeuse équipe de scientifiques, avec trois autres manipeurs venus prêter main-forte, devant la cabane de pointe Morne