vendredi 11 octobre 2019

Les lapins de Kerguelen

Les Lapins* de kerguelen.


* A noter que le terme « lapin » est banni sur un bateau, on préférera employer « BLO » pour « Bête aux Longues Oreilles ».

  Les lapins sont omniprésents à Kerguelen et notamment autour de la base. La densité de lapin peut atteindre 16 individus à l’hectare sur les milieux favorables.  

Le lapin (Oryctolagus cuniculus) a été introduit par des marins sur la Grande Terre de l’archipel de Kerguelen en 1874 (Kidder 1876), ceci pour subvenir aux besoins en nourriture carnée d’éventuels naufragés.
Les lapins rencontrèrent des conditions favorables à leur installation et leur développement : l’absence de compétiteurs herbivores, l’absence de prédateurs et des conditions climatiques et édaphiques ont favorisé sa multiplication.
Le lapin occupe la plus grande partie de la Grande Terre. Il est également présent sur au moins 9 autres îles ou îlots de l'archipel. Seules quelques îles et îlots du Golfe du Morbihan (Australia, Mayes, Haute, Longue…) et certaines îles du nord et de l’ouest (île Foch, île St Lanne Grammont, îles Nuageuses, île de l’Ouest) n’ont jamais été fréquentées par le lapin. 


Actuellement, son impact le plus important concerne les communautés végétales par l'élimination du chou de Kerguelen (Pringlea antiscorbutica) et de l'azorelle (Azorella selago) remplacés par Acaena magellanica qui recouvre l'ensemble des zones mésophiles sous la forme de groupements pratiquement monospécifiques. En consommant les plantes, en érodant le sol par le creusement de ses terriers, le lapin favorise la colonisation de graminées introduites comme Poa annua et contribue à la diminution de la diversité spécifique des plantes dans tous les habitats (Chapuis et Boussès, 1989; Chapuis et al., 2004). Il a également affecté l’avifaune les sites de nidification de différentes espèces de pétrels (Weimerskirch et al., 1989).

L‘ilot Françoise, exempte de lapin, le chou de Kerguelen et l’azorelle sont très présents.
En présence de lapin, le chou et l’azorelle ont disparu
Afin de limiter la population de lapins, le virus de la myxomatose a été introduit en 1955-1956 occasionnant une réduction importante de l’effectif en lapins au cours des années qui ont suivi l’introduction du virus. Cependant, compte tenu de la résistance des lapins à ce virus, leur densité est restée élevée.
Les relations entre les espèces introduites animales et végétales sont aujourd’hui beaucoup plus complexes qu’il n’y parait. Ainsi, si l’on pouvait éradiquer le lapin de la totalité de l’archipel de Kerguelen (action inenvisageable tant la population est aujourd’hui élevée), son absence n’aurait pas forcément l’effet positif attendu. Sur plusieurs petites îles du Golfe à l’image de l’île verte, l’expérience a été tentée. L’île verte pourrait aujourd’hui s’appeler l’île jaune tant elle est recouverte de pissenlit ( Tarxacum sp espèce introduite à Kerguelen). L’absence de lapin sur cette île n’a pas permis au Choux de Kerguelen à l’azorelle reprendre leur place face à la concurrence du pissenlit très invasif.
Le plan de gestion 2018-2027 de la Réserve Naturelle Des Terres Australes Françaises prévoit une poursuite des études de l’effet du retrait du lapin sur la végétation pour évaluer la pertinence de l’éradication de l’espèce sur les secteurs où cette action pourrait encore être bénéfique. Trois îles du Golfe du Morbihan pourraient être concernées (Inskip, Chat et Cimetière). 

Merci à Clément Clasquin, agent chargé du « suivi des mammifères introduits » à la Réserve Naturelle, pour les références scientifiques et les photos.

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