L'accès à la colonie et au site de sourcils noir se mérite; après 2h45 à bord du chaland, l'Aventure II, nous sommes déposés sur le halage des naufragés qui sépare les presqu’îles Ronar'ch et Jeanne d'Arc.
Il faut ensuite effectuer une bonne marche pour atteindre la cabane de sourcils Noirs qui sera notre camp de base pour toute la durée de la manip.
En approche du canyon…
Après 4 heure d’efforts, nous découvrons, blottie au creux de son ravin, la cabane de Sourcils Noirs.
Notre petite cabane est un vrai nid douillet, en bordure d’une jolie petite rivière. On peut y dormir jusqu’à 7 personnes.On y trouve son traditionnel entassement de touques, ces bidons bleus étanches dans lesquels les vivres sont stockés au sec et à l’abri des rongeurs. Le ravitaillement des cabanes se fait lors des opérations portuaires par hélicoptère, comme pour les refuges dans nos montagnes des Alpes ou des Pyrénées.
On remonte ensuite sur le plateau pour se rendre au bord de la falaise, où nous attend la « caisse bois ». Ce type de module, lui aussi déposé par hélico, sert de lieu d’entrepôt de matériel.
Nous nous y équipons du matériel de sécurité, casque, baudrier de travail avec torse, système anti-chute et double longe et nous voila partis pour équiper la main-courante.
Deux longueurs de main-courante plus bas, nous arrivons sur une grande terrasse d’où l’on accède à la colonie nichée à flanc de falaise
Un albatros peut faire jusqu’à
plus de trois mètres d’envergure ; le plus grand est l’albatros hurleur,
mais celui qui nous intéresse aujourd’hui est un peu plus petit, mais ça fait
quand même un volatile de trois à cinq kilos, pour 2 à 2,40 m d'envergure. Il peut vivre jusqu'à une soixantaine d'années. Et côté aérien, c’est un vrai voilier qui
ne bat quasiment jamais des ailes, surfant dans les airs et utilisant le
moindre vent.
Notre grand oiseau pélagique n’est pas le seul à
fréquenter les lieux, et on trouve aussi en grand nombre le gorfou macaroni aux
aigrettes magnifiques qui lui ne vole pas, et remonte depuis le rivage sur la
falaise, empruntant des vires où il s’accroche au rocher grâce à ses petites
pattes palmées et griffues.
Notre « maca » est un peu tapageur et territorial, avantageusement doté par dame nature d’un bec bien puissant avec lequel il maintient vigoureusement ses congénères à bonne distance de son nid. Car il ne faut pas l’oublier, si tout ce monde-là se donne la peine de grimper ici, c’est pour nicher et assurer sa descendance. Son jeu favori consiste à voler les cailloux du nid du voisin !
Gare donc à celui qui s’approche trop près, car il en pince pour vos mollets !
Et une fois dans l’eau, oubliée sa démarche hésitante et maladroite : il se transforme en nageur de combat, véritable torpille évoluant à une vitesse sidérante pour pêcher ses proies!
Parmi les autres occupants des falaises environnantes, on trouve aussi l’albatros fuligineux dont le corps est digne du plus beau fuselage d’Airbus, ainsi que l’albatros à tête grise.
Une fois quitté la main courante qui nous a amené sur notre vire, plus question d’évoluer sur une corde au beau milieu des nids ; c’est donc avec précaution qu’il faut se faufiler entre les oiseaux et les nids, sur un terrain parfois délicat...
Quatre aires ont été définies par les responsables de programmes scientifiques et font l’objet depuis de nombreuses années d’un suivi en termes d’évolution de la population, mais aussi sur d’autres domaines (alimentation, comportement,… ).
Sur chacune de ces aires topographiées, les nids sont numérotés et contrôlés lors des manips. On plante des fiches avec numéro pour les identifier. Les albatros réutilisent en effet les mêmes tous les ans, qui prennent de la hauteur progressivement.
On note l'occupation pour chaque nid. Un suivi des couples est réalisé par la même occasion.
On consigne enfin la présence d’un œuf, et le numéro de bague de l’oiseau.
Puis lors d’une autre manip un bon mois plus tard, on mesurera le succès de reproduction (présence de poussin). Il n’est pas toujours évident de s’y retrouver et cela nécessite une bonne coordination entre les manipeurs qui relèvent les éléments observés sur les nids et les oiseaux, et celui qui retranscrit tout cela sur son calepin et sur un plan.
Tout en faisant attention aux nombreux oiseaux en vol ou en phase d’atterrissage. Ici un tête grise, les "aéro-freins" sortis.
Comment ne pas succomber à ce regard charmeur…
Vous comprenez maintenant pourquoi sourcils noirs ? c’est ce délicat masque noir autour de l’œil qui évoque un sourcil.
A l’issue de bonnes journées de travail, les quatre aires seront ainsi répertoriées, soit près de 300 nids.
Crédits photo : L. Jaunatre - A. Patoir
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