Dans
le cadre du programme 109 de l’Institut Paul Emile Victor, nous avons réalisé
un suivi des jeunes éléphants de mer de leur naissance jusqu’au sevrage. Notre
zone d’étude s’étendait sur 1km de plage à Pointe Morne, située à trois heures
de marche à l’Est de Port Aux Français. En pleine période de reproduction, on y
trouve l’un des plus grands rassemblements d’éléphant de mer sur la péninsule
Courbet. Les éléphants de mer s’y retrouvent pour former des harems : un
mâle pour plusieurs femelles.
Après avoir mise bas et allaitée leur petit
durant une vingtaine de jour, les femelles sont fécondées avant de retourner en
mer pour plusieurs mois. Le suivi des jeunes éléphants de mer commence dès la
naissance. Après avoir identifié les petits nés du jour, nous les avons marqués
à l’aide d’une bague sur la nageoire arrière droite, puis nous les avons
mesurés et sexés.
Un deuxième passage a été effectué une quinzaine de
jour après la pose des premières bagues, pour retrouver les individus marqués
qui ont été sevrés. Lorsqu’un petit est sevré, il a tendance à s’écarter du
harem. Une fois les jeunes éléphants de mer sevrés, nous les recapturons pour
cette fois-ci les mesurer, les peser et effectuer une prise de sang.
Ce
deuxième passage nous renseigne sur plusieurs choses. Il nous permet d’une part
d’avoir une idée du taux de mortalité durant cette phase critique de la vie des
éléphants de mer. Il nous renseigne également sur le sex-ratio de la population
étudiée et nous donne une idée de la prise de poids importantes que les jeunes
éléphants de mer prennent en quelques jours. Il faut s’imaginer que les petits
à la naissance ne pèsent qu’une trentaine de kilos et qu’ils peuvent prendre en
20 jours plus d’une centaine de kilos ! Les femelles repartant très vite à
l’eau, il faut que les jeunes éléphants de mer aient de quoi tenir avant
d’apprendre par eux-mêmes à se nourrir de petits poissons dans les semaines qui
suivent leur sevrage. Ces jeunes éléphants de mer restent généralement près des
côtes tant qu’ils ont des réserves, puis vont explorer l’océan dès lors que la
faim se fait ressentir. Cette phase juvénile est encore très peu étudiée
actuellement, c’est pourquoi de nouveaux projets voient le jour, comme celui
initié par l’équipe Prédateurs Marins du Centre d’Etudes Biologiques de Chizé,
il y a un an maintenant et qui vise à déployer des balises sur ces jeunes
individus, avant qu’ils ne partent en mer. Cette étude permettra à terme d’en
apprendre encore un peu plus sur l’apprentissage et l’évolution des
performances de plongée et de pêche de ces jeunes prédateurs marins.
Déploiement de balises sur 16 femelles adultes avant les voyages
post-reproduction
Dans le cadre du
programme 109 de l’Institut Paul Emile Victor, diverses recherches sont menées
pour tenter de comprendre les déplacements des éléphants de mer des Iles
Kerguelen lors de leur voyage post-reproduction (fin octobre-début janvier) et
d’étudier les zones dans lesquelles ils s’alimentent. Dans ce contexte, 16
associations de balises ont été déployées sur des femelles adultes éléphants de
mer au mois d’octobre 2014 sur le site de Pointe Morne, située à trois heures de marche à l’Est de Port
Aux Français. Ces balises permettent d’enregistrer une multitude de
paramètres en continu et in situ.
Au
cours de cette session de terrain, nous avons déployé des accéléromètres, des
magnétomètres qui permettent de reconstituer la trajectoire de l’animal dans
les 3 dimensions, mais aussi d’obtenir la vitesse de nage et les mouvements de
la tête dans les 3 dimensions. Nous avons aussi des capteurs CTD
(Conductivity-Temperature-Depth) qui permettent d’enregistrer les paramètres
océanographiques au cours des plongées des éléphants de mer et des capteurs de
lumière qui permettent de déduire des informations sur la quantité de
phytoplancton présente dans la colonne d’eau. Enfin, nous avons aussi déployé des acousondes
qui enregistrent le bruit ambiant et tentent de déterminer si les éléphants de
mer peuvent détecter un signal acoustique issu de poissons de la famille des
myctophydés.
En
étudiant le comportement de plongée, il est possible d’identifier les zones où
les éléphants de mer s’alimentent et de les relier aux conditions
océanographiques enregistrées. Ainsi, on peut établir un lien entre l’environnement,
la disponibilité des ressources et les stratégies d’alimentation des éléphants
de mer de Kerguelen dans l’océan austral.
Afin
de suivre le trajet de l’animal et relocaliser la femelle quand elle revient à
terre deux mois plus tard pour muer, des balises GPS sont ajoutées aux
précédents appareils. Cette dernière phase est très importante car elle permet
de collecter les données enregistrées à haute-résolution pendant le voyage. L’animal est recapturé,
anesthésié et la balise est récupérée.
Sans cette étape nous disposerions que des données transmises par satellite
beaucoup moins précises et moins nombreuses.
Le protocole se déroule dans
l’ordre suivant :
Capture de l’animal avec une
capuche, anesthésie, pesée, pose de balises, prises de sang, mesures et réveil
de l’animal.
Récupération de balises sur
des mâles et des femelles adultes après les voyages post-mue
Les éléphants de mer effectuent deux grands types de
voyage en mer, les voyages post-reproduction d’environ deux mois (fin octobre à
début janvier) et les voyages post-mue d’environ 8 mois (fin janvier à début
septembre). Ces derniers sont des voyages où les animaux s’alimentent de façon
active afin de reconstruire leurs réserves pour la période de reproduction et
de mises-bas. Certains individus voyagent autour de Kerguelen tandis que
d’autres se déplacent jusqu’au plateau antarctique où ils s’alimentent sous la
glace de mer, sur les fonds du plateau antarctique ou encore
dans le courant antarctique côtier. Dans le cadre du programme 109 de l’Institut Paul Emile Victor,
l’objectif est de comprendre les différentes stratégies mises en place par les
mâles et femelles éléphants de mer lors de ces voyages, et de mettre en
évidence comment l’environnement va moduler l’abondance des ressources qu’ils
consomment.
Afin
de répondre à ces problématiques, des balises CTD ont été déployées sur une
vingtaine d’individus en janvier 2014 pour enregistrer les paramètres de
plongée et les conditions
océanographiques en continu
tout au long de leur trajet. L’objectif de notre mission entre septembre et
novembre 2014 était de récupérer ces balises dès que l’animal arrivait à terre
pour la reproduction. Grâce à la localisation Argos, 11 individus ont été
retrouvé et recapturé (8 femelles et 3 mâles). Le protocole se déroule de la
manière suivante : capture de l’animal avec une capuche, anesthésie,
prises de sang, pesée, mesures et on retire la balise qui contient toutes les
données à haute-résolution.
Les
données enregistrées à haute-résolution permettent de reconstruire les masses
d’eau traversées par l’animal, les conditions de glace de mer rencontrées et
donc l’habitat dans lequel l'animal évolue.
SARA LABROUSSE JOFFREY JOUMA'A Les POP ELEPH